Retour sommaire


Dr Marc-David Leclair, Pr Y Héloury
Service de chirurgie infantile
Hôpital Mère-Enfant, CHU de Nante
s

Mise à jour 01 12 2002

 

Pathologie du prépuce de l'enfant


Adhérences balano préputiales
Balanites
Phimosis

Introduction

Le prépuce et sa pathologie associée sont un motif fréquent de consultation du petit enfant. La question du phimosis, et plus globalement du décalottage du petit garçon d'âge pré-scolaire y sont fréquemment évoqués. Une analyse des données récentes de la littérature nous a amené à remettre en cause la place de la prise en charge chirurgicale de ces enfants. Nous exposons ici les différentes situations cliniques rencontrées, et la conduite thérapeutique que nous adoptons.

Les adhérences préputiales

Ces adhérences sont des accolements transitoires du prépuce muqueux à la face postérieure du gland. Elle sont physiologiques chez le  nouveau-né et le nourrisson, et très fréquentes  chez le petit enfant : leur incidence à l'âge de la maternelle est estimée à 30% des enfants non opérés . Ces adhérences préputiales, même si elles sont un facteur pouvant concourir à la survenue d'infections,  ne doivent plus être considérées comme pathologiques.
Elles s'accompagnent parfois de smegma, sous la forme de nodules blanc jaunâtres incrustés dans le sillon balano-préputial. Ce smegma est à différencier des balano-posthites car il ne s'accompagne jamais de signes inflammatoires, et disparaît avec la levée des adhérences.
En cas de persistance anormalement longue, certains auteurs  préconisent la libération des adhérences en consultation, après application d'EMLA®. Nous considérons pour notre part qu'elles ne doivent jamais être libérées en force, d'autant que dans l'immense majorité des cas, elles se lèvent spontanément avant la puberté.

Les infections : balanites et balano-posthites

Il s'agit d'une infection inflammatoire ou d'une infection du gland ( balanite) ou du gland et du prépuce (balano-posthite), survenant le plus souvent à l'âge de la maternelle. Cette pathologie est liée à la conjonction de 3 facteurs : défaut d'hygiène locale, adhérences préputiales et/ ou phimosis. Elle évolue en plusieurs phases, de la simple inflammation localisée au gland, à l'infection balanique et préputiale sévère avec signes généraux.
Le traitement repose sur les anti-inflammatoires non stéroïdiens et une antibiothérapie généralement cas de fièvre ou d'infection locale sévère. Il est important de souligner qu'il ne faut surtout pas chercher à décalotter l'enfant pour évaluer l'état du gland, car ce décalottage est impossible sans majorer les lésions. De même , il faut bien préciser aux parents que les soins locaux doivent se faire sans la moindre tentative de décalottage, par de l'eau et du savon associé éventuellement à de la Bétadine ( jamais de Dakin).
Il est par contre utile de réexaminer l'enfant à distance de l'épisode, à la recherche d'un phimosis causal ou séquellaire, surtout en cas de récidive.

Le phimosis

Le phimosis se définit comme l'impossibilité permanente d'effectuer un décalottage complet du gland, due à la présence d'un anneaux fibreux circonférentiel à l'extrémité du prépuce. Considéré comme physiologique à la naissance, il n'atteint plus que 5% des garçons à la maternelle ).
Il s'agit d'un motif de consultation très fréquent, mais dont il ne faut surtout pas se préoccuper avant l'âge de au moins 3 ans. Il est également important de déconseiller aux parents les tentatives de décalottage pouvant aboutir à la constitution d'un para-phimosis ; il s'agit d'un décalottage complet ou non mais irréductible du gland. L'impossibilité de recalottage, très douloureuse, aboutit à l'installation d'une souffrance balanique auto entretenue par l'oedème. Cette situation est une urgence chirurgicale : réduction du prépuce sous anesthésie locale ou générale. Nous avons l'habitude de compléter le traitement par des AINS pendant quelques jours, associés à des antiseptiques locaux.
Chez l'enfant ayant acquis la propreté nocturne et diurne, la question du traitement chirurgical du phimosis a longtemps été sujette à controverse, entre les partisans de la circoncision et ceux du traitement conservateur. Ce dernier, qui consiste à réaliser une plastie dorsale du prépuce (intervention de Duhamel par exemple), semblait, au moins en France, être l'attitude la plus raisonnable, en dehors de toute considération religieuse.
Depuis 1993, plusieurs publications ont déplacé la controverse sur le terrain conservateur médical.
En effet plusieurs équipes ont publié les résultats d'essais cliniques sur l'utilisation de dermo-corticoïdes  en applications locales dans le traitement du phimosis de l'enfant. C'est Jorgensen qui le premier en 1993 rapporte un essai ouvert sur le traitement de 54 enfants avec un taux de succès de 70%. De nombreuses études se sont succédées depuis, certaines basées sur des protocoles prospectifs en double aveugle. Le nombre de malades inclus est variable ( de 27 à 111 enfants avec un taux de succès de 75 à 95%). Le protocole utilisé est le suivant :

Dermocorticoïdes classe II
type bétaméthasone crème à 0,1% (Betneval®)
2 ou 3 applications quotidiennes pendant 4 à 6 semaines

L'application doit être circonférentielle sur l'extrémité du prépuce mis en tension, et l'enfant ne doit pas être décalotté pendant toute la durée du traitement.
L'enfant est revu en consultation à l'issue du traitement ou le décalottage est dans la grande majorité réalisé par le chirurgien sans difficulté.


La surface cutanée traitée est évaluée à moins de 0,1% de la surface corporelle totale. Aucun effet secondaire systémique n'a pu être observé, et la comparaison des taux de cortisol plasmatique avec un groupe témoin ( traité en insu avec de la vaseline) ne retrouve pas de différence significative.
Il semble que le taux de succès est largement dépendant de la compréhension , de la motivation et de la compliance des parents.
Certaines variantes thérapeutiques ont été décrites, avec des résultats tout aussi bons. Elles reposent sur l'utilisation d'anti-inflammatoires non stéroïdiens ( type diclofénac Voltarène®, Emulgel®... hors A.M.M.), d'oestrogènes locaux, en passant même par l'association dermocorticoïdes - ßHcg parentérale.
Le coût de ce traitement est très inférieur aux coûts de prise en charge chirurgicale ( entre 3 et 4 fois moins selon qu'il s'agit d'une circoncision ou d'une plastie de prépuce).
Les contre-indications sont le lichen scléro-atrophique, qui semble se solder systématiquement par un échec, et surtout, l'âge : nous ne proposons jamais ce traitement avant l'âge de 3 ans. Il faut en effet attendre l'acquisition de la propreté nocturne. Par ailleurs, la tolérance aux corticoïdes semble être meilleure.
Comme nous l'avons vu, les échecs sont rares, et en grande partie liés soit à un lichen, soit à une mauvaise observance du traitement. En cas d'échec après un traitement correctement conduit, il est licite de proposer une plastie de prépuce. En l'absence de lichen, il n'y a là, pas plus qu'ailleurs, d'indication à une circoncision.
Il s'agit là en conclusion d'une nouvelle prise en charge du phimosis de l'enfant, simple, efficace, et sans complication particulière. Insistons sur l'importance de ne jamais accepter de traiter ces enfants avant l'âge de la propreté.
Il faut, en matière de prépuce, savoir attendre que le phimosis régresse, ou que des adhérences se lèvent spontanément et se garder d'être trop agressif malgré un contexte social ou familial souvent demandeur de "normalité".

 

Haut de page

Retour sommaire